Le patrimoine civil

Le patrimoine civil

Disséminé sur l’ensemble de la commune, il faut se déplacer pour le découvrir. Les  grands domaines privés ne se visitent pas sans l’accord des propriétaires. On peut cependant les apercevoir, parfois en s’arrêtant simplement au bord d’une route, d’autres fois en acceptant de marcher un peu sur un chemin.

Le château d’Artigny

 Le château du XVIe siècle
Au premier plan, le pont sur la douve, face au chemin d’accès bordé d’ormeaux, greffé sur le « chemin de Loudun aux Tiveaux ». Seule la moitié droite du château, avec une tour ronde coiffée d’un toit conique, a été conservée
Lavis d’Antoine Ferdinand Arnault-Poirier pour le Registre statistique du contrôle de Loudun, commune de Ceaux, 1839, coll. Jacques Sergent.

Quelques repères historiques :

Nous ne savons rien d’Arténius, personnage gaulois ou gallo-romain, qui a pu donner son nom au domaine, et pas beaucoup plus de la petite forteresse médiévale implantée en bordure d’une zone de marais dont il reste probablement les douves, toujours en eaux, et le nom d’une parcelle, la « pièce du Pont Levis ».

La plus ancienne mention du château date de 1471 avec Pierre Scolin qui rend hommage au seigneur de Basché pour« son chastel et appartenances d’Artigné ». Le blason des Scolin, sculpté au-dessus d’une porte, permet de leur attribuer la construction du château du XVIe dont seule une partie a été conservée. Au milieu du siècle, le mariage de Louise Scolin avec Aymery Robin, chambellan du duc de Montpensier et gouverneur d’Honfleur, fait glisser Artigny chez les La Tremblaye-Robin.

Le château actuel :

Il se compose de deux parties, la plus ancienne remontant au XVIe siècle, l’autre datant de l’important chantier du XIXe. Ces deux constructions se distinguent nettement par leur différence d’élévation ; la première étant plus basse que la seconde. La plate-forme du château, formant un vaste quadrilatère, est entourée de douves maçonnées, toujours en eau.

À la charnière de deux époques
À gauche, la partie XIXe avec l’escalier monumental, à droite, la partie XVIe et sa tour épargnée, au fond, le clocheton indiquant l’emplacement de l’ancienne chapelle, détruite, mais dont les vestiges ont été consolidés.
Photo prise en 2006, lors d’une visite organisée pour les habitants de Ceaux

La partie XIXe présente deux tours, une tourelle en encorbellement et une tour plus puissante couronnée d’un faux chemin de ronde sur mâchicoulis. Elles sont toutes percées d’ouvertures dont certaines comportent une traverse de pierre. Il en est de même pour les fenêtres du logis, différenciées, néanmoins, par un décor sculpté plus abondant et un bandeau mouluré retombant sur des culots. La façade principale reçoit un escalier monumental composé d’un perron précédé d’une volée droite. Le logis s’élève sur trois niveaux au-dessus des caves, le dernier étant sous combles. L’ensemble de l’édifice porte une couverture d’ardoises. Enfin, bordant sur plusieurs côtés la plate-forme du château d’Artigny, s’étendent de vastes communs et servitudes.

Comment découvrir Artigny ?

En dehors d’une visite organisée, on découvre la partie XIXe du château à partir de la route Richelieu-Couesmé (en venant de Richelieu) et mieux encore sur le chemin de La Ménagère. Il vaut mieux choisir l’hiver ou le début du printemps pour que les arbres soient sans feuilles.

Depuis le chemin de La Ménagère
On aperçoit successivement le pigeonnier carré (1846), la partie XIXe du château, puis, en continuant,  la partie XVIe.

Principales sources et références :

– Pour la toponymie : Pierre Gauthier, Noms de lieux du Poitou, Éd. Bonneton, 1996, p. 49

– Pour la pièce du Pont-Levis : AD 86, cadastre « napoléonien », section B3, 1838

– Pour la succession des familles : AD 37 16 J 9, 19 déc. 1471, aveu de Basché et 3 E 20 11, 14 juin 1697 – Photocopie d’une généalogie La Tremblaye-Robin (non référencée)

– Pour la description du château : texte rédigé pour l’association Art et Culture en Pays loudunais par Francis Michaudet Laurent Romero, historiens d’Art

Pour aller plus loin : promenade n° 1, Autour de l’étang d’Arbonneau,  Artigny, pp. 18/25.

Le manoir de La Faverie

La Faverie aujourd’hui

Le manoir en 1919 et 1993
Très caractéristique des demeures seigneuriales du XVe siècle, le manoir n’a pas subi de transformations majeures. Il a conservé son toit à fortes pentes et, au point de rencontre des 2 ailes, la tourelle d’escalier polygonale qui assurait la desserte des étages. On retrouve également, à l’entrée de la tourelle, la porte surmontée d’un gable (élément décoratif en forme d’accolade aiguë) et 2 fenêtres à meneaux à l’étage.
 Les autres ouvertures ont été fortement modifiées. Un nouveau bâtiment a été accolé au pignon de droite, sans rupture d’harmonie.
Dessin de Louis Charbonneau-Lassay, musée de Loudun, mai 1919 et d’après photo SN, 1993.

Quelques repères historiques :

Citée dès 1471, cette propriété de l’abbaye de Fontevraud n’a sans doute jamais eu le statut de prieuré.  Il s’agit d’une seigneurie dont dépendaient deux métairies, La Briffaudière et La Jarrie.

À la charnière des XVe et XVIe siècles, la gestion de l’ensemble était encore directement assurée par l’abbaye, par l’intermédiaire d’un religieux qui n’hésitait pas à se déplacer, voire à séjourner sur le terrain, tel « frère Jehan Chauchet, prieur de Sainct Ladre en Fontevrault, gouverneur et administrateur perpétuel de la maison de la Faverie », venu, en 1500, négocier l’achat d’un pré proche de La Briffaudière.

À partir du XVIe siècle, la gestion se fait indirectement, par l’intermédiaire d’un fermier général assez fortuné pour verser un important prix de ferme fixé devant notaire. Le fermier qui traite directement avec l’abbesse, n’est pas lui-même cultivateur, il effectue seulement un placement financier, en espérant récupérer sa mise, avec bénéfice, en signant des baux avec les sous-fermiers, chargés de l’exploitation des terres.

Tout change et rien ne change avec la Révolution. En juillet 1791, La Faverie et ses annexes, sont vendues comme bien national à Pierre Montault des Îles, « receveur particulier des finances de la ci-devant élection de Loudun » pour le compte de sa belle-mère, Louise Lemoine de Chèvremont. En 1824, « la terre de la Faverie » et tous les domaines qui en dépendent sont acquis par les châtelains d’Artigny, Charles Léopold de Mondion et son épouse Mélanie de Messemé.

Comme sous l’Ancien Régime, l’exploitation des terres reste confiée à des métayers, par l’intermédiaire d’un fermier général jusqu’au début du XIXe siècle, en traitant directement avec les propriétaires ensuite. Cette situation perdure jusqu’en 1913, lorsqu’un échange de terres avec Clotilde de Mondion permet à une famille d’agriculteurs, les Blucheau, de devenir propriétaire de La Faverie. Elle appartient toujours à la même famille aujourd’hui.

Comment découvrir La Faverie ?

Le manoir est parfaitement visible depuis la route de Chinon, sur la gauche, après l’embranchement de La Voyette et depuis la route Richelieu-Couesmé, sur la gauche, après l’allée du château d’Artigny pour la façade principale, après le croisement avec la route de Chinon pour l’extérieur des bâtiments.

La Faverie depuis la route Richelieu-Couesmé
Photo SN, oct. 2014

Sources et références :

Pour la transmission de la propriété : AD 86 1 Q 420 art. 461, 11 juil. 1791- transcription des actes de mutation, 7 oct. 1824-4 Q 4637 n° 27, 14 avr. 1913.

Pour aller plus loin : promenade n° 2, Sur le domaine de Fontevraud, pp. 7/14.

Le château de Chavagne

Quelques repères historiques :

Évoquer un château à Chavagne peut surprendre. Il figure pourtant sur le plan cadastral de 1838 et son nom se retrouve dans de nombreux documents d’archives, depuis sa première apparition, au début du XVe siècle.

Le château sur le plan cadastral de 1838 et en 1997
À gauche, sur le cadastre « napoléonien », les anciens  bâtiments sont toujours en place, prolongés par le parc (parcelle 71) qui s’étend jusqu’à Guigné où il intégrait une métairie dépendant du château.
Encore debout la fuye ronde (pigeonnier), ancien privilège seigneurial. La grande maison bourgeoise du XIXe siècle n’est pas encore construite.
À droite, les vestiges du château en 1997. Cannelures de l’encadrement des ouvertures du premier étage, probablement prolongées par des lucarnes autrefois, accolade de la petite fenêtre du rez-de-chaussée, indiquent que la longue construction perpendiculaire à la route n’était pas un banal bâtiment de ferme.
D’après cadastre napoléonien numérisé, 1838, AD 86, section K feuille 7 et Photo SN, 1997

Bien avant de devenir châtelains d’Artigny, les Mondion sont seigneurs de Chavagne depuis le mariage de Pierre de Mondion avec Renée Hervé, héritière du domaine, en 1554. Ils en conservent la propriété jusqu’en 1850.

Sources et références :

– Pour l’histoire de Chavagne : AD 86 4 E 53 397, 12 janvier 1660 (cite les actes antérieurs)-AD 86, reg. Suppl. 291, folio 147, 3 décembre 1554 et Dictionnaire généalogique et historique des familles du Poitou, Beauchet-Filleau, Poitiers, 1891 (version numérisée)- AD 37 3 E 22 147, 24 janvier 1850.

Pour aller plus loin : promenade n° 3, Sur les terres du roi, pp. 16/21.

Le « château » de Ceaux

Mystérieux château totalement absent des archives consultées jusqu’à ce jour. Il est pourtant présent dans la mémoire collective comme le prouvent les notes relevées par le docteur Pierre Delaroche et transcrites dans les archives de la Société Historique du Pays de Loudunois : « Ceaux possédait un château où Charles IX séjourna. Souvenir : la ruelle des douves et une fenêtre à meneau qui donne dans le jardin de la propriété de Melle Lebeau ».

Le château de Ceaux vu par les enfants du centre de loisirs en 1999
Sur ce dessin que l’on peut retrouver sur un mur d’une salle de l’école,
l’aspect du château relève de l’imagination mais témoigne de la puissance de la mémoire collective et de sa déformation.

Le cortège qui entourait le jeune roi Charles IX, 15 ans, a effectivement fait étape, le temps d’un dîner, dans le « pauvre village » de Ceaux en 1565. Prestigieux cortège qui regroupait la reine-mère (Catherine de Médicis), un roi, deux futurs roi (le duc d’Anjou, futur Henri III, 14 ans et Henri de Bourbon, futur Henri IV, 12 ans) et une future reine, Marguerite (la reine Margot), 12 ans.

Quant au château, on peut l’identifier avec la belle maison du XVe ou XVIe siècle qui accueillait la cour de justice qu’on appelait la baronnie, transférée à Richelieu en 1631. Elle ouvrait sur la rue des Jardins encore nommée « chemin des douves » en 1909, sans savoir s’il s’agissait de véritables douves ou d’une simple tranchée.

Que reste-t-il de ce « château » aujourd’hui ?

Un morceau de toit à double pente accentuée et un pignon aigu, une fenêtre à meneaux et une porte à accolade rue de la Mairie, une autre fenêtre à meneaux dans un jardin privé, en maintiennent le souvenir.

Les vestiges du « château »
7 rue de la Mairie (à gauche)
Dans un jardin privé ouvert sur la rue des Jardins (à droite)
Photos SN, juillet et août 2019

Sources et références :

– Pour le passage du cortège royal : Pierre Champion, « Catherine de Médicis présente à Charles IX son royaume (1564-1566) », Ed. Bernard Grasset, Paris, 1937.

– Pour la rue des Douves : Archives privées, donation du 24 mai 1909, passage d’un acte communiqué par Jean-Michel Gorry en 2019.

Le château de Joué

Il ne reste rien de ce château qui a pourtant défié les siècles. Pour le retrouver, il faut faire appel aux archives et d’abord au plan cadastral de 1838 sur lequel il est encore bien présent, à l’entrée du village, à droite en venant de Ceaux, au bout d’une grande allée bordée d’arbres.

Le château sur le plan cadastral de 1838
Son espace est aujourd’hui occupé par un champ, accolé à sa métairie sur laquelle sera construite la grande maison de maître du XIXe siècle.
D’après cadastre napoléonien numérisé, 1838,
AD 86, section F feuille 7

Il reste également quelques éléments de description. Deux actes, respectivement datés de 1695 et 1696, le situent au cœur d’un ensemble seigneurial renfermé « de viel fondement de murailles et fossez », limité à l’est, par le « chemain tendant de l’esglize de Joué à Ceaux », et au nord par le «chemain tendant du village de Bourgueil à celluy des Mées ». Ils évoquent aussi une « allée garnie d’ormeaux », les « grande et petite portes », plusieurs galeries, un grand escalier à vis « fondu de pied en cime », une « tourette » entre le portail et le grenier et une tour ruinée à l’autre bout du grenier.

Sources et références :

Pour la description du château : AD 86 4 E 56 174, 26 avril 1695 et 2 E suppl 202, du 23 « may » 1696.

Pour aller plus loin : promenade n° 6, L’ancienne paroisse de Joué, pp. 17/25.